AYAKO
Cette oeuvre est la plus surprenante de Riyoko IKEDA en collaboration avec Etsuko. C'est très déconcertant au départ et je n'avais pas accroché dans un premier temps, trouvant le dessin et l'esprit du manga trop éloigné d'elle. J'ai changé d'avis.
Ayako est une jeune fille appartenant à une noble et riche famille mais sa naissance recèle un terrible secret : sa véritable mère, criminelle condamnée à mort, passa un pacte avec une mystérieuse et hideuse créature alors qu'elle était en prison. De cette union, naquit Ayako.
Mais après 12 ans d'une vie paisible et heureuse, ce secret est découvert par ses parents et le Dr OGATA (le médecin de famille) qui tentent de l'assassiner, sans succès. Ayako est alors perpétuellement poursuivi par ce dernier qui tente d'exposer ses origines démoniaques et de la supprimer. Elle va petit à petit réveiller ses aptitudes infernales pour sauver sa vie...
Si Ayako se montre impitoyable, on en arrive à la comprendre car elle nous ressemble et elle porte sûrement des actes que nous rêverions de porter nous-même, un peu à l'instar du Death Note. En effet, Ayako est scolarisée, elle a des amies, elle ressent les choses comme une adolescente, elle fait des activités de son âge (shopping, bowling...), elle tombe amoureuse, bref... une jeune fille classique. Sauf qu'elle fait plusieurs fois l'expérience de la trahison et de la mort et ce, de manière très violente. Sa réponse et ses actes sont à l'image de ceux qui l'a cherchent.
Finalement, on se demande même si Ayako n'est pas l'envoyé du Diable pour punir cette famille FUMOTO et son entourage, tellement ils sont ignobles.
Le travail, resté incomplet, est composé de six épisodes indépendants. Cela peut aller dans la même veine que "La comtesse en noir" et les nouvelles suivantes qui forment le Tome 3 de Lady Oscar.
C'est un manga profondément noir, amoral et injuste, à l'image des personnages qui le composent. D'ailleurs, la marque d'identification de la famille FUMOTO, les parents non biologiques d'Ayako, sont l'absence de canine... Mais ils n'en mordent pas moins symboliquement. Tout est dit...
D'ailleurs, dans la 6e histoire, un des membres de la famille des Fumoto (les WASHIMORI par la mère d'Ayako) finit empalé sur une fourche et brûlé comme un vampire... a la bonne heure !
De même, ne cherchez pas un peu d'amour au travers de ces pages. L'amour n'est qu'une stratégie pour arriver à ses fins. Les hommes sont menteurs et manipulateurs, les femmes qui tombent sous leur charme sont vouées à des morts peu enviables (empoisonnement, emmurées, brûlées...).
"AYAKO" est un thème que retrouve fréquemment dans la littérature japonaise. Mais c'est d'abord Osamu TEZUKA qui a composé cette oeuvre : cliquez ici.
LES CHAPITRES
La naissance d'Ayako (chapitre 1)
Une condamnée à mort fait un pacte avec le Diable pour échapper à l'échafaud. De ce pacte nait une enfant. Afin de lui éviter la honte de sa naissance et de continuer une histoire familiale tordue et tragique, elle réussit à échanger son enfant avec celle d'une autre femme issue de la grande noblesse japonaise. Douze ans plus tard, l'enfant, devenue la belle Ayako souffle ses bougies. Mais le médecin de famille et chercheur en hématologie en parallèle n'entend pas laisser un bonheur perdurer sur un mensonge diabolique. A mi chemin entre le fanatico-mystique et le savant fou, le Dr OGATA, avec le soutient des parents d'Ayako, va chercher à l'éliminer au profit de la véritable Ayako qui est à l'orphelinat. Le monde d'Ayako s'écroule et face à la perversité de son entourage, la jeune fille montre des capacités de survie peu morales mais efficaces...
La traduction est ici "La naissance d'Ayako"
Le sonnet de la vengence (chapitre 2)
C'est la 2e nouvelle d'Ayako qui décide de venir en aide à une camarade de classe désargentée et qui est la risée des autres élèves. En appui de l'aide qu'elle va lui apporter, elle va se venger de ses parents qui cherchent à la tuer.
Voici, traduite en français, la 2e nouvelle d'Ayako.
Fugue musicale pour un premier amour (chapitre 3)
Ayako et ses amies cherchent à acheter une guitare quand un jeune homme surgit et exige d'acheter la guitare qu'Ayako a choisi. Ayako va lui céder et en échange il lui donne une étrange broche en forme de chat... Plus tard, ce même jeune homme fait irruption chez elle et séquestre ses parents. Son histoire résonne avec celle d'Ayako (fils d'un criminel, honni par la société...) et elle décide de l'aider : il est accusé à tort d'avoir assassiné la Directrice de son orphelinat. Mais dit-il la vérité ou les amies d'Ayako qui le trouvent "louche" avec ses "excuses bidons" ont-elles vu juste ? Les sentiments d'Ayako sont de l'amour inavoué mais il ne fait pas bon la trahir...
Voici la traduction de cette 3e histoire "Fugue musicale pour un premier amour"
Le masque (chapitre 4)
Cette 4e nouvelle commence sous le signe monstrueux de guêpes parasitant d'autres insectes vivants pour nourrir leurs larves... Puis le parallèle est fait avec l'existance même d'Ayako, le fruit d'une bête qui parasita une humaine... Le ton est donné. Ayako est victime d'un chantage par une vieille femme qui était dans une cellule de prison attenante à sa mère biologique. Cette dernière menace de révéler au grand jour concernant le secret de la naissance d'Ayako si celle-ci n'accède pas à ses désirs : mener une vie de princesse comme elle. Dans le même temps, Ayako rejoint quatre autres de ses cousin(e)s chez une vieille tante richisime qu'ils surnomme la Veuve Deigan à cause du masque de kabuki qu'elle porte. Une seule chose les anime individuellement : avoir leur nom inscrit sur le testatment, et pour ce faire, voler le fameux sceau qui les désignera comme héritiers. Le jeu de dupes commence !
Voici la traduction "Le masque", 4e histoire d'Ayako.
Kaleidoscope (chapitre 5)
Alors que le conflit familial semble s'être calmé, faute aux parents d'Ayako d'avoir pu l'éliminer, voilà que le Dr OGATA ressurgit avec une idée abominable. Il s'aperçoit que le sang d'Ayako est une combinaison entre des facteurs humains et un autre facteur qui n'appartient pas à l'espèce humaine. Toujours dans sa folie mystico-scientifique, il croit avoir retrouvé la trace du démon sur terre. Il se met pour mission de l'éliminer non sans en tirer son parti. Cette nouvelle est odieuse, OGATA étant à vomir tant par rapport aux femmes, qu'à la poursuite de ses intérets personnels ou de son rapport à la différence humaine. Manipulateur et charismatique, il retourne l'esprit à tous, sauf à Ayako qui n'est pas dupe longtemps (elle l'a quand même supplié à un moment). Nous mêmes sommes pris dans une curiosité malsaine en suivant les avancées scientifiques du Dr OGATA qui va découvrir qui est le père d'Ayako ! Ou pas finalement... Ayako est traitée comme une chose et non comme une personne et on ne s'étonnera pas du tour de force final où elle échappe à la mort et se venge du Dr OGATA de la pire des façons pour un homme si orgueilleux : l'humiliation publique.
Voici la traduction de "Kaleidoscope".
Tarentule (chapitre 6)
Ayako est invitée par son cousin germain, le Baron Teruhiko WASHIMORI, à venir le visiter sur ses terres campagnardes au fin fond des montagnes. Pas de Dr OGATA en vue, ce qui pourrait augurer d'un séjour heureux. Mais non... Bien plus beau, charmant et parfait selon les adjectifs d'Ayako, le 4e héritier des WASHIMORI a bien l'intention de restaurer l'aura de sa famille, désargentée et méprisée par celle de la ville. Entre OGATA et lui, mon coeur balance à choisir parmi la pire des personnalités. Egoïstes, assassins et manipulateurs, une jeune femme éprise de Teruhiko va l'aider à raviver une vieille légende de vampire afin de réhabiliter la famille WASHIMORI. Ayako va y participer, sans comprendre, avant de découvrir le pot aux roses et sauver sa vie in extremis. Comme à l'habitude japonaise, et je vous renvoie pour cela vers l'excellent "Black Rose Alice" de Setona Mizushiro, les vampires ne sucent pas le sang directement de leur victime mais utilisent des petites bestioles monstrueuses, dont des araignées. C'est le cas ici, d'où le titre "Tarantule". On se rapproche fortement de l'esprit du 3e tome de Lady Oscar composé de gaiden sur la Comtesse en noir. Cette 6e histoire d'Ayako est bien ficelée et prenante jusqu'au bout...
Voici la traduction de "Tarantule".
Il est à noter qu'il existe une légende japonaise sur une créature mytique "Jorogumo" qui date de la période Edo (1603-1867) : une araignée, habituellement tisseuse de toile orbitèle, se voit accorder des pouvoirs magiques lorsqu'elle atteint les quatre cents ans. L'araignée grandit et prend la forme d'une belle jeune femme qui attire les hommes dans un endroit tranquille en jouant du biwa (luth japonais). Ensuite, elle attache sa victime à l'aide de fil de soie puis elle la dévore. Parfois, elle prend aussi la forme d'une femme portant un bébé, qui peut être son sac à oeufs (extrait du livre "La voix des vagues" de Jackie COPLETON).
ILLUSTRATIONS