Le monde de Lady Oscar
Le monde de Lady Oscar

La Rose de Versailles / LAdy Oscar

 

L'article sur feu Mangaverse.net était une excellente critique / résumé. La critique n'étant plus en ligne, il n'y a plus les photos. Je vous mets la critique ci-dessous (j'en avais gardé une copie textuelle) mais avec mes propres photos.

 

1755. La famille de Jarjayes attend un heureux événement. Au grand désespoir de son père, c'est une fille. N'ayant pas d'héritier masculin, il décide de l'appeler Oscar et de l'élever comme un garçon pour en faire un grand soldat au service du Roi. La même année naît en Autriche Marie-Antoinette, 9ème fille de l'Impératrice d'Autriche Marie-Thérèse. Quatorze ans plus tard, elle deviendra l'épouse du futur Louis XVI, et Oscar François de Jarjayes deviendra un de ses plus fidèles soutiens et son protecteur, prêt à déjouer tous les complots et les traîtrises qui hantent le château de Versailles. Mais rien n'arrêtera la colère du peuple et la Révolution de 1789...

 

"La rose de Versailles" (Versailles no bara en japonais) est un manga de Riyoko Ikeda (à qui on doit également le manga dont a été tirée la série tv "Très cher frère") sorti initialement chez Shueisha en 10 volumes en 1972. Il a ensuite été réédité plusieurs fois dont une version en 2 volumes chez Chuokoron-sha. C'est cette version que Kana nous propose aujourd'hui dans sa collection shôjo. En France, c'est par la télévision que "La rose de Versailles" s'est fait connaître, par la série TV "Lady Oscar", en 40 épisodes. A noter également une version live tournée par Jacques Demy en 1978.

Alors finalement que dire de ce manga. Personnellement avant de l'avoir, je ne savais pas trop à quoi m'attendre. Déjà par rapport au format inhabituel (voir le paragraphe sur l'adaptation), puis surtout car il s'agissait d'un manga d'il y a 30 ans (un peu peur que le dessin ait mal vieilli), dont je connaissais déjà bien l'histoire pour avoir fidèlement suivi la série à la TV. Comment ne pas être déçue dans ses conditions ? Et bien pourtant, j'ai été charmée par le manga.
 

Le dessin fera forcément fuir d'office tout réfractaire au shôjo: je n'ai jamais vu autant d'yeux remplis (littéralement) d'étoiles dans un manga. Des nez pointus, des chevelures luxuriantes, des personnages minces aux longues jambes. Ce qui est très intéressant c'est de comparer les dessins des premières pages à ceux des dernières pages: le trait s'est affermi, semble bien plus maîtrisé (certains dessins sont même réellement très beaux). Les personnages font très nobles, très élégants. Bref le dessin va à ravir au manga. A noter par contre énormément de caricatures pour rendre les sentiments les plus extrêmes, la colère, l'énervement, la joie, d'une manière assez comique. Forcément, quand on a en tête la série TV (où tout humour était assez absent), voir soudain Oscar, André, la Reine, montrer des dents de requins, des petits coeurs à la place des yeux etc... ça donne un côté assez bizarre.

 

Il vaut donc mieux éviter d'avoir la série TV en tête en lisant le manga (certains événements n'existent que dans la série TV, d'autres sont bien plus détaillés dans le manga, et il y a une différence assez importante entre le manga et l'anime, mais cette fois-ci dû au doublage français de l'anime... je pense que certains voient de quoi je parle). L'approche n'est pas vraiment la même, il y a des passages bien plus légers dans le manga, même assez drôles. Mais pour autant il y a toujours autant de drames et de tragédies (je ne sais pas pourquoi, ça me fait penser à Tezuka qui de la même manière ajoutait ici et là des caricatures et autres détails comiques dans une scène tout ce qu'il y a de plus sérieuse). 

 

Les personnages sont enfermés dans le carcan des traditions, de leurs rangs, des règles d'usage. Oscar encore plus que les autres, du fait qu'elle est une femme mais se doit d'agir comme un homme, finissant même par oublier qui elle est. La Reine et Oscar ont ceci en commun qu'elles seront toujours extrêmement seules, même entourées par leurs innombrables admiratrices ou courtisans, n'ayant pas le droit d'aimer en toute liberté, emprisonnées dans leur rôle, leur destin. Ecartelées entre leur devoir et leur coeur.
On ressent parfaitement bien le caractère complexe et torturé de chacun des personnages, leur évolution. Ainsi que le changement de ton qui s'effectue petit à petit: la nouvelle dauphine qui dès sa première apparition sera adorée par le peuple, puis petit à petit, suite aux machinations, aux manipulations de certains membres de la cour, qui feraient tous pour satisfaire leur soif d'argen

t et de pouvoir, amèneront facilement la Reine, insouciante et plus apte à s'amuser qu'à diriger, à s'attirer la haine du peuple.


On ne s'ennuie pas une seconde. C'est très riche, vivant, ça se lit très facilement (alors que j'aurais cru trouver ça un peu lourd voire indigeste), aidé en cela par une narration bien shôjo (donc assez libre) mais qui reste claire. Plusieurs destins s'entremêlent, pour le meilleur et surtout le pire, on ne s'y perd jamais. Pas de côté larmoyant ou mélo, malgré bon nombre de drames, d'amours interdites et impossibles.

 

Les personnages ont tous un caractère bien affirmé : Marie-Antoinette d'abord insouciante et spontanée, qui va se faire griser par le pouvoir et la fortune et perdre de vue le bonheur de son peuple, pour petit à petit mûrir, tout en souffrant d'un amour impossible. Oscar, belle et intrépide, au tempérament explosif qui supporte mal les concessions et l'hypocrisie, parfois un peu cynique, noble et petit à petit honteuse de l'être, charismatique, forte au combat mais si fragile au niveau des sentiments. Rosalie et Jeanne, à l'opposé l'une de l'autre, l'une si gentille et généreuse, l'autre si ambitieuse et sans scrupule, Fersen, André, le Roi, Robespierre, Madame de Polignac, la Comtesse du Barry etc... Pas de niaiseries, de guimauve ici, personne ne se fait de gentillesse, la bataille pour le pouvoir est féroce.

 

Bref, un shôjo manga très prenant, mouvementé, avec certains dessins très beaux, aventures et romance au rendez-vous. J'attends le second et dernier volume avec impatience, je m'étonne moi même mais j'aime beaucoup :). En plus ça vous fera réviser votre histoire de France (même si elle est quelque peu remaniée :))

 

Niveau adaptation: quelque chose qui étonne forcément quand on voit le manga pour la première fois: il est énorme. Eh oui, imaginez 10 volumes classiques réunis en 2. Ca donne un manga de 960 pages, d'un format plus grand que les autres. D'où le prix de 19 euros, qui même s'il parait excessif au premier abord est finalement très avantageux: la série complète ne coûtera que 38 euros alors qu'en version 10 volumes, ça aurait coûté: 10 x 5,25 = 52,5 euros...
Si ça vous dit, voilà deux photos (12) comparant "La rose de Versailles" à un manga Kana classique...
Au menu, jaquette flottante sur couverture souple, qui donne un ensemble assez solide du moment qu'on ne joue pas au foot avec. Egalement 4 pages couleurs sur papier glacé eu début du volume, une présentation de l'auteur, et de l'oeuvre par Ikeda elle-même (à éviter si vous ne connaissez pas l'histoire, vu qu'il y a quelques spoilers dedans). Papier plus fin que pour les autres kana, j'imagine que l'ensemble aurait été encore plus épais, lourdet moins solide avec le papier habituel. Pas rencontré d'énormes erreurs (hormis que Louis XVI est une fois présenté comme le fils de Louis XV alors qu'on l'appelle son petit fils ailleurs...). Par contre des problèmes d'encrage, quelques pages où l'encre a pas mal bavé et nuit donc à l'ensemble.
Sinon, rien à redire, il fallait oser sortir un manga sous cette forme. En sens de lecture japonais qui plus est"

 

POINTS FORTS

  • des dessins qui finalement se révèlent assez beaux et tout à fait adaptés au manga
  • des personnages forts, charismatiques, tourmentés
  • des histoires d'amour impossibles, comme il se doit
  • une grande aventure, parfait pour réviser en douceur ses cours d'Histoire (un peu romancés, certes...)
  • des pointes d'humour grâce à des caricatures
  • le livre en lui-même étonne...

 

POINTS FAIBLES

  • si on est allergique au shôjo, le dessin rebutera
  • si on détestait Lady Oscar à la tv, il vaut mieux éviter...

 

EN BREF...

Un classique shôjo qui a fait rêver toute une génération à la tv avant d'enfin arriver chez nous en version manga. Suivez Oscar de Jarjayes dans une grande fresque sur fond de Révolution française, tromperies, machinations, scandales et amoures impossibles...

 

CE QU'EN DIT Riyoko IKEDA (préface de février 1987, édition Kana)

 

"Versailles no bara" est une oeuvre qui a été publié au Japon sous forme de série dans le magazine hebdomadaire pour jeunes filles "Margaret" durant 82 semaines, du printemps 1972 à l'autonome 1973.
La lecture du roman "Marie-Antoinette" de Stefan ZWEIG m'a fortement marquée et depuis, j'ai toujours eu envie de dessiner une histoire se passant pendant la Révolution française. J'ai peint le début de celle-ci dans
Versailles no Bara avec force et passion malgré mon manque de maturité dans le manga. Donc, pour moi aussi, cette oeuvre est en quelque sorte un des symboles de ma jeunesse.


A l'époque, aborder un sujet historique dans un shojo manga [manga pour filles) était en soi une grande aventure. Pour la réalisation de ce projet, j'ai du convaincre la rédaction qui était sceptique, en arguant que même un sujet historique, s'il est traité de façon drôle et compréhensible, pouvait faire un tabac. Et cette oeuvre a connu le plus grand succès dans l'histoire des shojos mangas. En effet, il y a eu, dès le début de la série, des fan-clubs d'Oscar dans tout le pays, une adaptation
théâtrale par la troupe Takarazuka, un disque enregistré par les Johnny's Junior Special, une adaptation au cinéma avec des tournages au château de Versailles et dans de nombreuses régions de France, la parution de la série dans un magazine pour enfants en Italie, une adaptation en série animée pour la télévision diffusée au Japon et dans tous les pays francophones, le merchandising de nombreux personnages, etc. Cette oeuvre a engendré un véritable engouement que les médias ont
qualifié de "boom de Verubara" ou de "phénomène social". La version de poche a été tirée à 12 millions d'exemplaires. L'oeuvre a contribué à donner au shojo manga ses lettres de noblesse et à élargir son lectorat au-delà des jeunes filles.

 

Parmi les fans de l'époque, nombreux sont ceux qui ont été influencés par cette série. Certains se sont orientés à l'université vers l'histoire occidentale ou vers la langue française, d'autres ont appris le français et d'autres encore ont économisé pour se rendre à Versailles et à Paris. Et même aujourd'hui, après toutes ses années, je reçois encore des lettres très émouvantes des fans du monde entier. Ces derniers temps, j'ai reçu de nombreuses lettres de jeunes filles de cette époque devenues mamans, qui m'écrivent "ma fille est en âge de lire des mangas, donc je lui ai suggéré 'Versailles no Bara'". Je lis avec attention chacune de ces lettres et je me retourne avec nostalgie sur ma vie et sur le temps qui passe à une vitesse fulgurante. Je me souviens d'avoir été submergée de travail au point de devenir tellement maigre que je devais faire des piqûres nutritives, d'avoir reçu de certaines femmes des lettres injurieuses, d'être tombée en dépression parce que je n'avais plus d'idées, d'avoir dessiné avec 40° de fièvre en me mettant des glaçons sur la main... J'avais à cette époque une passion à laquelle j'étais capable de tout sacrifier sans aucun regret, une idée fixe qu'on ne connait pas plusieurs fois dans sa vie - comme "l'explosion d'une étoile", pour reprendre l'expression de Stefan ZWEIG - un moment d'élévation qu'on n'échangerait contre rien, et aussi la jeunesse de mes 24 ans.

Au moment où la série paraissait dans les magazines de jeunes filles, beaucoup d'entre elles ont recherché des livres sur la Révolution française ; elles ont déconcerté leur professeur d'histoire en demandant si Oscar était un personnage historique ; certaines ont pleuré et ne sont pas allées à l'école le jour de la mort d'Oscar. Beaucoup d'autres choses ont dû encore se passer dans l'existence de ces jeunes filles. Cette fois, en réponse à la demande passionnée de la "deuxième génération" de lectrices, Versailles no Bara a été édité par Chuôkôronsha en 2 volumes de collection. Pour moi, auteur de shojo manga, profession méprisée il y a peu, j'ai goûté encore une fois à la joie d'en être le créateur. Cette oeuvre est une fiction, même si elle fait référence à l'Histoire. Par souci de cohérence, j'ai modifié sciemment certaines choses. Cependant, dans la mesure du possible, j'ai essayé de rester fidèle à la vérité historique. Il semble néanmoins que, pour les jeunes lecteurs de primaire, sa compréhension ait été difficile. De plus, la rédaction du magazine souhaitait que je termine la série dans les 10 épisodes qui suivent la mort d'Oscar. Certains lecteurs se sont plaints de la difficulté de suivre la chronologie historique, mais je pense avoir dessiné tous les faits importants. 


J'aimerais également répondre aux questions les plus fréquemment posées pendant la parution de cette série. Oscar, André et la famille de Jarjayes sont des personnages de fiction et je n'ai pas eu pour eux de modèles précis, à l'exception du père d'Oscar, pour qui je me suis inspirée du véritable général Rénier de Jarjayes. La relation filiale entre Rosalie et Mme de Polignac est également une invention. Charlotte, Alain et Girodelle sont aussi des personnages fictifs. Certains d'entre vous ont remarqué que Bernard Chatelet avait été largement inspiré de Camille DESMOULINS. Cependant, il n'y a aucun lien réel entre Camille DESMOULINS et le cavalier noir. Je voudrais m'excuser également pour les uniformes de la garde française qui sont en fait ceux des gardes royaux. Je n'avais pas pu les modifier à l'époque car je n'avais pas eu la documentation dans
les temps. L'uniforme porté par Oscar date du début du XIXe siècle, de l'époque napoléonienne. Je l'ai choisi pour ses qualités esthétiques. Le prénom allemand de Marie-Antoinette, lorsqu'elle était archiduchesse d'Autriche, était Maria-Antonia. Pour éviter la confusion chez les plus jeunes, j'ai délibérément unifié au seul prénom de Marie-Antoinette.


On dit que la Révolution française prit fin avec l'arrivée au pouvoir de Napoléon. Dans "Eroica", série parue dans le magazine féminin "Fujin Kôron", on retrouve Alain et Bernard, les survivants de "Versailles no Bara". Je mets en scène "la deuxième partie" de la Révolution française. C'est un projet que j'avais à coeur depuis longtemps.

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