C’est un thème qui peut choquer pour un shojo manga d’autant que les thèmes sont plutôt l’amour, la liberté, la destinée et la lutte pour être soi-même quand on est une femme (Oscar, Julius, Rei, Kaoru…).
C’est en rêvant de « La Fenêtre d’Orphée » avec un mélange cauchemardesque de ce qu’on appelait il y a quelques années ‘les tournantes’ (viols collectifs de jeunes filles dans les caves d’immeuble en disant qu’elles le méritaient parce que c’étaient des s*** + parfois des mutilations) et de quelques images furtives d’un autre manga « Front Mission – Dog Life » sur ce qu’est la guerre, que je me suis mise à reprendre la Fenêtre d’Orphée et l'oeuvre en général de Riyoko IKEDA.
De manière synthtétique, un viol est un acte sexuel imposé à une personne qui, si elle pouvait, l’aurait évité. Elle n'y a donc pas consenti et cela cause des dommages psychologiques graves (et souvent physiques aussi).
Ex. : l’agression sexuelle manifeste, la contrainte sexuelle entre conjoints, l’acte sexuel avec une personne qui n’ose pas dire non, l’acte sexuel avec une personne qui n’est plus en état de dire non (alcool, médicament, sommeil…), etc.
Dans le tome 4 de La Fenêtre d'Orphée (édition espagnole), page 180, Roberta est une belle jeune femme des bas quartiers qui vit avec son père qui est un alcoolique notoire. Elle travaille dans le même bar que Frédérique, la soeur d'Isaac et si, elle peut être un peu allumeuse et vulgaire, elle n'en reste pas moins claire avec les hommes.
Son père la "prête" à un type qui a envie de coucher avec elle contre une poignée de monnaie pour aller s'alcooliser en extérieur. C'est une scène de viol sans équivoque car non seulement Roberta a eu peur de l'intrusion dans la maison de l'homme, elle exprime clairement le refus et, en plus, il est obligé d'utiliser la violence pour abuser d'elle. Elle finit par errer dans la rue, comme fuyant symboliquement ce qu'elle vient de vivre et elle tente de se raccrocher à la vie quotidienne (aller travailler). Ce sont des pages très dures et difficiles. Ces viols se répèteront.
Le thème du viol est un véritable leitmotiv dans « La Fenêtre d’Orphée » notamment incarnée par la belle et discrète Garina qui est le symbole de la sauvagerie humaine aussi bien dans la rue, chez elle ou au travail. Elle meurt enceinte sous le viol et les violences des soldats. On relie tout de suite le destin horrible qui attend la merveilleuse Anastasia dans le goulag entre les horreurs vécues par Klaus & ses compagnons, et la femme qui arrive en prison.
Rien n’est montré, mais la suggestion par les textes et les postures des femmes intègres font plus encore ressortir le caractère barbare et injuste. Et puis, il n’y a aucune justice. Les hommes resteront impunis quelque soit leur niveau social ou le lieu.
Dans Lady Oscar, il n’y a rien de tout cela dans le dessin animé bien épuré. A peine, Charlotte de Polignac qui préfère le suicide au mariage avec un vieux pervers qui lui a salit symboliquement la main par un baiser malsain (qu’elle tente d’effacer désespérément dans l’eau de la fontaine de Versailles). Dans le manga, il n’y a pas de viol mais des instants de pré-viols. Et encore, rarement. Il y a SYSTEMATIQUEMENT des actes qui ne vont pas jusque bout + des excuses des hommes fautifs.
Ainsi, c’est le cas d’André qui ne peut se contrôler et bascule Oscar sur son lit en arguant de son amour (NB. : il n’y a pas de motif valable pour excuser un viol).
C’est le cas de Charlotte de Polignac, citée ci-dessus, mais où on perçoit très bien ce que le geste du pervers laisse présager pour la suite d’autant qu’il lui prend la main de force.
C’est le cas d’Oscar qui manque de peu d’être violée par les Gardes françaises si André n'était pas intervenu à temps.
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Pour en revenir à la Fenêtre d’Orphée, j’ai été choqué de la récurrence du viol mais pas consciemment. Il m’a fallut le rêve pour franchir la barrière mentale, très certainement liée au fait qu’un shojo manga est « gentil » et porte en lui de grandes émotions positives (même si l’histoire est tragique).
Je ne sais pas ce qui a pu motiver Riyoko à exposer ce thème. S’il est en filigrane dans Lady Oscar, il ne laisse plus aucun doute dans La fenêtre d’Orphée.